Que ce nouvel album d'Uriah Heep porte bien son titre ! Déjà, c'est leur premier depuis la mise en sommeil du groupe suivant "Sonic Origami" (1998, 10 ans ! Une belle sieste pour les papys !). Ensuite, il est un retour aux affaires d'une implacable force, un inattendu come-back sévèrement burné pour un groupe qui avait, trop longtemps, navigué dans les eaux troubles et nauséabondes du hard fm le moins créatif qui soit. On peut le dire, le sleeper est de nouveau awake !

Certes, depuis "Sea Of Light" (1995), un très net mieux s'était fait sentir le groupe comprenant, enfin, que ses fans ne les attendaient définitivement pas sur le territoire du hard rock radiophonique. Il n'en reste pas moins que pour ceux, dont votre serviteur, qui s'enthousiasmaient sur la période David Byron (et, à moindre titre, sur la vacation de John Lawton entre 1976 et 1979) la sauce avait une trop forte insipidité pour qu'on ait envie d'y tremper souvent son petit bout de pain... Alors ? Est-ce le départ forcé, pour raison de santé, du batteur vétéran Lee Kerslake (né en 1947) et son remplacement par une "jeune" pousse au curriculum vitæ avantageux (Russell Gilbrook, né en 1964, disciple déclaré de feu-Cozy Powell, ayant joué, entre autre, avec le jazzman Chris Barber, Tony Iommi, l'ex-Camel Pete Bardens ou encore Van Morrison) qui a ainsi dynamisé le groupe ? Dieu (alias Mick Box pour Uriah Heep) seul le sait.

Produit par Mike Paxman (collaborateur de longue date de la chanteuse pop/rock britanique Judie Tzuke et producteur des cinq derniers albums des boogiemen de Status Quo), "Wake The Sleeper" est le 21ème album de Uriah Heep, le premier pour le label fondé par le manager historique d'Iron Maiden, Rod Smallwood (qui l'a quitté en 2006). Le moins que l'on puisse dire, c'est que leur contrat est magnifiquement honoré par cette première offrande ! Ainsi, dès le premier titre, le "bombastique" "Wake The Sleeper", on sent que le groupe n'est pas revenu aux affaires pour faire tapisserie ! La rythmique "double grosse caisse", l'hammond enfin de retour (exit les affreux synthétiseurs digitaux qui pourrirent trop longtemps le son du groupe), la guitare alternant riffs plombés, "wah-waheries" bien senties et parties lead typique du sieur Box, la voix haut perchée bien dans le mix (le texte se limitant au titre du morceau et à quelques vocalises Byronienne en diable)... Tout est réuni pour rappler ce que fut Uriah Heep dans sa période de gloire du début des années 70 : un putain de bon groupe de hard rock ! C'est même plus heavy que jamais que le Heep nous revient... 'Sont en colère les vieux !!!

De leur son des 70's, on retrouve la suavité rageuse d'un son organique et vrai mais réhaussé ici par une production moderne mettant parfaitement en valeur l'énergie développée par cette sélection de compositions de qualité. Certes, après trois titres "tout-en-burnes", le rythme s'appaise quelque peu sur "Light Of A Thousand Stars", "Heaven's Rain" et "Book Of Lies" où le groupe retombe un peu dans ses travers FMinés (on ne se refait pas). Et, pour tout dire, on est alors pris d'un doute quand aux intentions retrouvées de la formation. Mais, heureusement, la mise-en-son et la qualité des compositions sauvent l'affaire et on est, alors, prêt à repartir sur la ballade épique qu'est "What Kind Of God". Il n'en reste pas moins que cet enchaînement de titres plus calmes est, selon moi une erreur et crée, ce que je regrette, un ventre mou à l'album... D'autant que les quatres titres qui suivent, et clôturent l'album, sont du même élixir en fusion que la triplette d'ouverture.Même les deux mid-tempos que sont "Angel Walk With You" et "Shadow" ne manquent pas de dynamique et de puissance et savent rappeler qu'Uriah Heep est, à juste titre, considéré comme un des inspirateurs de ce qui deviendra plus tard le metal progressif.

En résumé, "Wake The Sleeper" est l'album que l'on attendait pas et les heureuses retrouvailles avec un groupe que beaucoup trop considèrent comme mineur (voire comme un Deep Purple de deuxième division, faut-ils qu'ils soient sourds pour avancer de pareilles imbécilités !) et qui mérite bien plus d'attention que sa réputation ne le donnerait à croire... Une excellente surprise sur laquelle je ne saurais trop vous conseiller de vous pencher !