Marillion - Happiness Is The Road (octobre 2008)
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Volume 1 :
1. Dreamy Street
2. This Train Is My Life
3. Essence
4. Wrapped Up in Time
5. Liquidity
6. Nothing Fills the Hole
7. Woke Up
8. Trap the Spark
9. State of Mind
10. Happiness Is the Road
11. Half Full Jam

Volume 2 :
1. Thunder Fly
2. Man from the Planet Marzipan
3. Asylum Satellite #1
4. Older Than Me
5. Throw Me Out
6. Half the World
7. Whatever Is Wrong with You
8. Especially True
9. Real Tears for Sale
 
Il existe paraît-il, très loin dans l'univers, derrière l'un de ces trous noirs insondables, une sorte d'asile pour planète folle, un sanctuaire pour toutes formes de vie en échec et la lente progression de notre Terre vers cet asile semble bien avoir repris tout récemment sa course. Durant ces années troubles, on assiste avec une certaine jubilation à l'évaporation des mirages, à l'élimination méthodique des tricheurs, des truqueurs et des illusionnistes. Cette purge se chargera aussi des bien pensants, des lanceurs de modes, des faiseurs de courants. A quel énième sous-sol la grande industrie du disque stoppera-t-elle sa descente aux enfers ? Combien de bulles éclateront encore avant que la planète ne retrouve l'équilibre dans son cosmos ?

Deux volumes complémentaires, cent dix minutes de musique, ce double album n'est pas un énième disque dans le système solaire. Il ne s'agit pas non plus de l'un de ces flux musicaux à rapatrier sur sa bécane pour l'écouter d'une oreille distraite en qualité médiocre. Après quelques années de voyage, la musique de Marillion s'est désormais totalement libérée de ses complexes et s'épanouit pleinement pour délivrer toute sa force évocatrice. Que les critiques continuent de s'occuper des baudruches volatiles, le public privé des pointures majeures de la pop ne s'y trompera pas, pour peu qu'il soit honnête et oublie tout ce qu'il croit savoir sur ce groupe. Car il n'est pas ici question de genre, de mode ou de courant. Il n'est pas non plus question de parti pris ou de choix esthétiques prémédités. A l'instar des plus grands disques, ce double album est un foisonnement libre au point d'en être un peu étourdissant.

Le premier volume « Essence » se déroule comme une sorte de longue digression musicale évoquant cette pesanteur si particulière qui nous affecte à la tombée des jours. On se retrouve enveloppé d'une lumière crépusculaire aux contrastes saisissants. Les images défilent et les sentiments se succèdent laissant parfois un goût amer. On est comme embarqués dans une sorte de train de foire qui traverse une grande variété de paysages fantomatiques, un jeu subtil d'ombres et de lumières. Le concept s'attache aux grandes questions de la vie, au mystère du temps qui fuit. La musique soulève avec allant la magie des instants comme on souffle de la poussière sur un meuble. On ouvre des albums de photos sépia pour s'apercevoir que toutes comportent un petit quelque chose d'étrange. Mais heureusement quand même, on avance vers une lumière qui se fait de plus en plus rassurante et le crépuscule inquiétant se transforme doucement en aube étincelante.

Le deuxième volume, « The Hard Shoulder » libère formidablement de la tension du premier en offrant des plaisirs plus directs. Il s'agit d'une belle collection de morceaux plus ou moins longs, toujours forts et qui brillent de la même production à la fois puissante et naturelle, profonde et précise. Là encore le groupe semble avoir trouvé la formule qui lui permet de réussir tout ce qu'il entreprend. L'espace s'ouvre enfin devant eux libérant un champ infini de possibilités. On saute allègrement d'une planète à l'autre, en passant par exemple de blues-rock cosmiques géniaux (Thunder Fly et Asylum Satellite#1) à la pop-prog-bubblegum de The Man Of Planet Marzipan. Le reste offre une belle variété de chansons colorées aux mélodies acidulées, peut-être moins spectaculaires mais tout aussi réussies.
Marillion délivre donc ici une musique rêvée servie par la formidable production de Mike Hunter. Car il fallait une alchimie et c'est peut-être ce sixième homme qui semble l'avoir trouvée, sans parti pris, sans volonté étriquée de s'inscrire dans un courant précis. Le groupe réussit là ce qu'il a souvent échoué par le passé tellement sans doute l'entreprise était audacieuse. On est un peu tenté de penser que ce disque rassemble tous les talents de Marillion aux différentes époques de leur carrière, qu'il pourrait même finir par en occulter toute une partie. Il a fallu se réinventer et traverser des orages magnétiques de tous ordres.

C'est désormais chose faite. L'ensemble est cohérent de bout en bout et le coffret comportant deux magnifiques livrets de photos offre cette fois un superbe complément visuel à l'aventure sonore. Marillion réussit à solliciter tous nos sens et nous comble enfin avec cette oeuvre unique qui force le respect. En espérant que ce soit un nouveau point de départ et non un point final à une carrière parfois maudite mais dont le jeu, on le sait désormais, en valait bien la chandelle.

Chronique par Nico "The Guest", de notre forum "The Box", merci à lui !
 
par Mitch
03 novembre 2008
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