Quel étrange groupe que Paradise Lost !
Après avoir longtemps donné dans le métal underground, à la croisée des chemins death, doom et gothique, sur des albums tels que Lost Paradise, Gothic, Shades Of God, Icon, ces anglais faussement dépressifs ont pondu un véritable OVNI métallisé, le sublime Draconian Times, en 1995. Cette œuvre à l'esthétique raffinée combinait à merveille lourdeur, mélancolie, gros riffs, solos mélodiques, le tout sur des arrangements remarquables et une production énorme de Simon Efemey. Puis Paradise Lost, soucieux de ne pas répéter la même recette, a opté pour une « électro-pop » un peu métallique et pour le moins déconcertante, au fil des albums One Second, Host, Believe In Nothing, ou encore Symbol Of Life.
Aujourd'hui, pour son dixième album, la boucle est bouclée avec cet opus éponyme qui se situe au parfait mi-chemin entre le métal beau et lourd de Draconian Times, et la période qui lui a succédé. Ainsi, la démarche artistique, la prise de risque, l'esprit de synthèse et l'équilibre de cet album sont hautement louables.
De gros riffs sont de retour (« Close Your Eyes », « Red Shift », « Sun Fading »), de même que les solos de guitare sur la plupart des morceaux ; les parties lentes et lourdes, typiques de Draconian Times (« Grey », « Forever After », « Over The Madness ») côtoient les refrains mélodiques et les boucles électro (« Red Shift ») ; le nouveau batteur Jeff Singer (ex-Blaze) et le producteur Rhys Fulber (Front Line Assembly, Fear Factory) assurent leur boulot sans faillir. Pourtant, nous ne pourrons nous enlever de l'esprit que quelque chose cloche, et que les auditeurs que nous sommes ne pourront, une fois encore, avoir le bonheur de retrouver le génie du groupe « pré-1995 »…
La voix de Nick Holmes, tout d'abord. Que serait-elle sans les couches d'effets qui l'enjolivent ?
En chant clair et mélodique pur, elle ne fait pas le poids sans artifice, on s'en rend bien compte en concert ; en chant métal ou hurlé, sur les anciens morceaux par exemple, elle ne fait plus le poids, tiraillée entre deux objectifs contradictoires. Les compos elles-mêmes, ensuite. En dehors de toute considération stylistique, que l'on parle de pop ou de métal, il se peut tout simplement que l'inspiration et l'alchimie inexplicable qui font les grands disques soient, à nouveau, absents de ce « Paradise Lost ».
C'est donc avec un sentiment mitigé que nous sortons de l'écoute de cet album.
Cet avis est sujet à débat, mais il est vrai que notre joie de retrouver un peu du « vrai » Paradise Lost a été tempérée par le peu de souffle de ces douze chansons de 3:30 minutes de moyenne… |