The Gathering, The West Pole... (Part III)

La Musique n'a d' intérêt et de beauté que si elle est un feu sans cesse renaissant. Après dix sept années d'existence, The Gathering n'avait plus grand chose à prouver et le groupe de continuer sa route, le feu couvant paisiblement au son de chaque album... Mais le musicien est semblable à l'homme et connaît dans son parcours les mêmes flammes à rallumer... Un départ précipité ou réfléchi, un événement qui bouleverse et cette question légitime: allons nous nous relever?

Allaient-ils survivre ? D'une simple étincelle... D'un je ne sais quoi, d'une volonté de continuer, de perdurer, de faire tout simplement de la musique... Celle-ci coulant en leurs veines, comment pouvaient-ils arrêter ainsi? Parce que dans un groupe, chaque membre a son importance. Nul n'est irremplaçable quand demeure encore cette volonté de jouer, de chanter, de composer un disque... De nouveaux sons, de nouveaux textes: The Gathering est debout, bien vivant... Avec le talent qu'on leur connaît. Aussi beaux et éternels qu'ils soient, les souvenirs appartiennent au passé telles des cendres à jamais étincelantes. Le présent offre désormais un nouveau visage, une nouvelle route à dessiner, un nouveau foyer.

Flamboyante, l'arrivée de la norvégienne Silje Wergeland au sein du groupe est sans aucun doute l'une des lueurs du nouvel album intitulé 'The West Pole'. Un éclat de pureté. Sans forcer, la voix parvient à livrer son lot d'émotions. Elles sont belles... Vitalité avec 'Treasure', force avec 'All You Are' , mélancolie pour 'No Bird Call', séduction dans 'You Promised Me A Symphony'... La voix de Silje joue ainsi sur plusieurs registres sans user d'expressivité forcée. Elle est peut être finalement celle qui correspond au mieux à la musique du groupe, la mettant en valeur sans artifice, lui donnant un sens... La musique guidant également les lignes vocales de la chanteuse, lui donnant à son tour une couleur. Une sensation de juste équilibre entre la voix et les notes. La norvégienne séduit ainsi et le groupe de faire de cette arrivée un choix judicieux et bien prometteur pour les performances scéniques.

Inspirées et soignées, les nouvelles compositions du groupe font de 'The West Pole' un album réussi. Si le son de The Gathering est reconnaissable par cette ambiance toujours emprise d'atmosphères et de sensibilités qu'il convient à chacun d'explorer, 'The West Pole' n'est finalement à rapprocher d'aucun autre album des néerlandais. Orienté rock, sonnant résolument live. La guitare mène ainsi la danse aux claviers qui viennent enrichir certaines parties musicales, la basse et batterie plus discrètes mais intervenant avec intelligence et sans excès. Aux morceaux les plus introspectifs, un ensemble de cordes, un harmonium ou un stylophone pour sublimer et faire monter les notes, le ciel à portée de mains. L'acoustique pour une seule et agréable ballade au piano, 'You Promised Me A Symphony'. Un ensemble propice une fois de plus à de beaux voyages...

Sans grande révolution mais avec quelques effets nouveaux, The Gathering parvient une fois de plus à surprendre son auditorat. Ainsi cette ouverture instrumentale, 'When Trust Becomes Sounds', où l'énergie, presque apocalyptique, de la guitare et de la batterie secouées d'une voix off dominera tout le titre. Sans aucun doute, la plus belle introduction que le groupe ait pu créer. S'ensuivent ensuite deux titres jouant l'efficacité: 'Treasure' et 'All You Are'. Forcément taillés pour la scène, ces titres aux refrains entêtants demeurent en tête dès la première écoute.
C'est avec ces titres rock, parfois proche de l'univers des Cardigans, que nous pouvons deviner que The Gathering aurait peut être tendance à vouloir séduire un public autre que celui catalogué 'metal atmospheric'. Ainsi ce 'No One Spoke', survenant un peu plus tard dans le disque, qui pourrait faire un excellent premier single. Qu'importe de toute façon que le groupe ait cette volonté (ou non) de conquérir d'autres territoires du moment que la musique ne soit pas sacrifiée au profit d'un titre résolument commercial et sonnant creux. Même dans ces titres dits les plus 'accessibles', le groupe demeure excellent et fait preuve d'ingéniosité... Il suffit d'écouter la fin brillante du dernier titre, 'A Constant Run', pour comprendre que The Gathering ne se laissera jamais gagner par une quelconque facilité.

A ces titres rock, les fans de la première (ou seconde) heure, trouveront de nouveaux joyaux... La direction musicale du titre éponyme, l'ensemble de cordes, la voix background et celle de Silje font de 'The West Pole' une nouvelle symphonie atmosphérique.
'No Bird Call' est dans la tradition de ce que le groupe ait pu faire de plus envoûtant et de plus triste. L'orgue et les cordes viennent renforcer cette tristesse et mélancolie pendant que Silje délivre sa complainte à l'infini.
D'une beauté stupéfiante, 'Capital Of Nowhere', avec la voix de l'hollandaise Anne Van Den Hoogen pour un mariage du plus bel effet avec l'instrumentation. Certainement, le titre le plus original de l'album. Composé de deux parties, la première chantée avec effet de réverbération sur la voix pour nous faire atteindre les cieux, la seconde laissant place à la guitare, le rêve de se poursuivre et lentement nous réveiller. A n'en pas douter, un morceau qui devrait procurer de beaux frissons en version live. Les yeux fermés...
Avec 'Pale Traces', nous atteignons un autre sommet. Celui de la béatitude. Tout simplement divin. Seconde invitée de l'album, la mexicaine Marcela Bovio nous rappelle à d'anciens souvenirs... Cette voix si proche et qui s'enfuit une nouvelle fois... Encore un titre dans la lignée des plus beaux de The Gathering.

Produit par René Rutten, mixé et arrangé par Zlaya Hadzich, 'The West Pole' est au final l'album que j'espérais entendre. En toute sincérité, un énorme coup de cœur dès sa première écoute. Au fil du temps, peut être l'album du groupe qui me procurera le plus de plaisir à entendre... Il en déçoit et décevra certains tout en plaisant à d'autres... On n'y peut rien... La musique sonne différemment en chacun d'entre nous. Quoiqu'il en soit, The Gathering reste toujours sincère et honnête... Avançant pas à pas, sans aucune précipitation, sans ensemble de brouillons... Avec cette faculté de m'émouvoir encore et encore, nul doute que la flamme de The Gathering brûle encore en moi... Et nul doute qu'elle brûlera longtemps encore dans les cœurs de nombreux fans... Même au Pôle Ouest, la tête au dessus-dessous des cieux...