Avec un « No hay billetes » affiché depuis plusieurs mois, la venue de Radiohead fut et restera l'événement majeur de cette saison de concerts qui débute dans les Arènes de Nîmes. « A ne pas manquer » écrivaient les revues régionales et autres guides touristiques ! Ainsi ce furent pas moins de 24 000 fans et 24 000 chanceux (un peu plus, un peu moins) qui auront fait le déplacement les 14 et 15 juin pour assister à la grande messe sonore et visuelle du groupe anglais. Près de cinq ans après leur premier passage, un certain 14 Juillet où la fête nationale avait pris des allures de cérémonie rock électro.

Le ciel menace de quelques gouttes de pluie... Je guette l'arc en ciel mais le soleil restera caché ce samedi. Dommage... No rainbows pour souhaiter la bienvenue à Thom et ses acolytes.
Aux abords des arènes, les stands merchandising... Tee shirt en matière recyclable et gourdes en acier, bienvenue dans l'ère écologique de la tournée ! Des militants feront signer d'ailleurs des cartes pétitions contre les gaz à effet de serre en échange d'un badge à épingler fièrement sur soi... Je signe, je te donne un badge mais tu repartiras quand même dans ta voiture polluante... Mouais ! Radiohead associé à l'opération avec utilisation d'éclairages économes en énergie et de matériaux recyclés... Quelques plaisanteries fusent ci et là... 'Il paraît que le micro de Thom Yorke est en papier mâché, les guitares en carton et que tout le concert se fera a capela sans enceintes'... Reconnaissons quand même le mérite au groupe de vouloir sensibiliser leur public sur le réchauffement climatique, fléau du temps moderne et technologique ! Suivra ou ne suivra pas, tout est question de soi...

18h30 et les portes s'ouvrent... La terre battue de la fosse est recouverte de bitume ! Oui de bitume anti pollution afin de protéger la terre mais certainement composée d'un savoureux mélange d'hydrocarbures !
Une musique et chant berbères transformeraient presque l'arène en mosquée... Les oreilles agacées par ce longgggggggggggg chant plaintif qui revient sans cesse. Non pas que ce soit déplaisant et original durant la première demie-heure mais franchement bien gavant quand le morceau semble se répéter à l'infini... Et quoi de mieux alors pour occuper le temps que de fabriquer des petits avions en papier (recyclé ?) et de les faire voler au dessus des têtes du public. Les traditionnelles olas pour manifester son contentement d'être là et son impatience à ce que le concert commence. Les minutes, les heures passent lentement lorsque arrive enfin le groupe assurant la première partie.

De Brighton, Bat For Lashes est mené de front par la chanteuse et multi instrumentiste Natasha Khan. Près d'elle, quatre musiciens gravitant autour d'un clavier, batterie, tambour et percussions, guitare et basse, violons et harpe, flûte traversière et clarinette, maracas et claquements de mains... Et j'en oublie certainement ! Un ensemble sonore musicalement très riche ! Dès les premières minutes toutefois, on ne peut songer qu'à l'empreinte de Bjork ! La voix et le côté nordique de la musique... Même la façon de bouger sur scène semble être copiée sur l'islandaise. Les premières morceaux séduisent mais sans pour autant vraiment captiver l'auditeur. Difficile en effet de s'imposer quand on a face à soi 12 000 personnes venant acclamer le plus grand groupe anglais. Et pourtant, il y a quelque chose de sympathique et d'agréable dans cette musique. Leur premier album, Fur And Gold, mériterait une écoute plus attentive. Le dernier titre 'What A Girl To Do' confirmera ma première pensée: un groupe à suivre de près. De la pop électro atmosphérique et rêveuse joliment exécutée mais qui ne convient pas vraiment à ce vaste endroit qui ne leur ait pas encore acquis. Quoiqu'il en soit, on ne peut que les féliciter pour leur brio et virtuosité. Rien que pour cela, bravo !

22h00 approche au rythme d'une musique reggae ! Vraiment étrange comme programmation musicale. On croirait à une blague faite par notre ami Thom... Ma foi, pourquoi pas mais étrange tout de même !

La scène s'illumine... Un long ensemble de néons conducteurs de lumière suspendus au dessus de la scène. Faisant songer à des stalactites, ils n'auront de cesse de nous éblouir durant tout le show.
Derrière ces néons, un long écran où seront projetées des images du groupe captées par caméra. Quelques cubes de lumières au sol, une rampe de petites lupioles à droite et gauche de la scène ainsi qu'au dessus. Deux drapeaux tibétains marquant le soutien du groupe au pays...
Quelques roadies s'affairent sur scène, testant les instruments. Deux échelles pour atteindre les projecteurs et les hommes araignées grimpent sous les encouragements du public... On sent l'effervescence gagner la plupart des fans. Allez, c'est pour bientôt !

Ne jouant jamais deux soirs la même setlist, les paris se font sur le titre qui introduira les deux heures et quart de spectacle. Hier 'Reckoner'... Qu'en sera t'-il de ce soir? Thom Yorke, Colin et Jonny Greenwood, Ed O'Brien et Philip Selway, les héros de la soirée, montent enfin sur scène. Acclamés comme il se doit et c'est '15 Step' suivi de 'Bodysnatchers', les deux premiers titres du dernier et excellent album en date 'In Rainbows', qui ouvrent le concert. Classique mais belle entrée. Le groupe est en forme et le son très bon ! Jolie acoustique. De mémoire, je crois n'avoir jamais été déçu par le son d'un concert donné aux Arènes.

Autour des titres du dernier disque dont je retiendrai particulièrement les magnifiques 'Faust Arp' et 'Nude', quelques plus anciens comme cet 'Airbag' pour lequel les guitares sont déployées. Un 'Just' et un 'Paranoid Android' bien déchaînés un peu plus tard dans la soirée. Difficile parfois de passer du son électronique des derniers albums au son rock des premiers. Comment faire autrement quand le groupe est en perpétuelle évolution d'un disque à l'autre ? Jouer 'In rainbows' dans son intégralité et nous offrir ensuite un ensemble d'anciens titres plus rock... Mais où et quand inclure les titres les plus électro issus de 'Kid A' ou d''Amnesiac' ? Finalement le choix proposé sera le meilleur ! Et la setlist plus que satisfaisante ! 'The Gloaming' auquel succédera 'Dollars And Cents', les rétines captivées par les lumières hypnotiques du light show ! Quel enchaînement !!!! Il y en aura bien d'autres tout au long de la soirée.

On le sait tous, Thom Yorke est avare en paroles. Quelques 'Merci', 'Ca Va?', 'Ok'... Pour ma part, je préfère cela aux longs discours moralisateurs à la Bonomania qui n'en finissent plus... Place à la musique. Une petit touche d'ironie toutefois pour introduire 'Optimistic': « We made a record called 'Kid A'... Everybody thought we were fucking mad... Including Our Management. But we were right ! ». Une excellente interprétation du titre. Aux absences de discours, la gestuelle de Thom. Ultra communicative. Frôlant l'épilepsie sur la plupart des morceaux électro., en transe bien souvent comme sur l'excellent 'Everything In Its Right Place' où l'artiste délaisse son piano pour venir se défouler, sautillant sur tout le devant de la scène.

Quelques moments plus intimistes comme ce 'Fake Plastic Trees'. De la guitare acoustique au crescendo électrique que l'on connaît tous et ces 'It wears me out' donnant de grands et forts frissons. La voix de Thom à la fois claire et puissante... Que dire également de ce divin 'How To Disappear Completely' ? Silence dans les Arènes... Malheureusement, 'Exit Music' sera absent ce soir. Je me console toutefois en me disant que j'ai déjà entendu ce titre joué lors de la précédente tournée.
Un 'Nice Dream' aurait été également le bienvenu. Un des plus beaux moments de la soirée restera ce 'Cymbal Rush' avec Thom, seul, au piano. Le risque est pris. On sent le titre très peu joué, les paroles ou notes accrochées à l'instrument. Et au final, un sublime moment et une jolie accolade de Colin envers Thom pour le féliciter.

Mécanique parfaitement bien huilée, le groupe ne se plante jamais. Ou s'il le fait, çà reste imperceptible sauf pour les fans les plus concentrés. Jeu de pédale pour faire sortir des guitares des sons venus d'on ne sait où, des lignes de basse venant parfois prendre le dessus sur les autres instruments, bien évidemment les claviers utilisés de doigts de maître par Jonny Greenwood. Thom Yorke également faisant joujou avec une batterie lors du très dynamique 'Bangers and Mash' !

Le final est toujours un moment important d'un concert. Le moment où il faut conclure en laissant le public K.O. Radiohead nous offrira deux longs rappels dont un dernier qui laissera l'auditorat sur les rotules. Tout simplement énorme ! Ce 'Cymbal Rush' donc suivi de 'You And Whose Army' et cette micro caméra figée sur le visage de Thom Yorke déclenchant quelques éclats de rire. 'Come on, come on... You think you drive me crazy'... Oui, à en devenir fou ! 'Optimistic' mettra tout le monde en transe avant que les lumières ne se rallument. Brutalement mais une fois de plus: quelle fin !!!!

Il est de temps de sortir des Arènes... Comme bien souvent lors des concerts monstres, tout le monde n'est pas conquis. De la fan hystérique jurant que Thom est Dieu au gars blasé trouvant le concert bien long et ennuyeux... Ce fut mon deuxième concert du groupe ! Tout simplement le meilleur qu'il m'ait été donné de voir dans ce lieu. Frôlant à tous les niveaux la perfection. Finalement, un arc en ciel musical de toutes couleurs...


Les photos ne sont pas toutes les miennes. Merci aux personnes qui se reconnaîtront...