Si le nom de Richard Barbieri peut sembler obscur à certains, il est malgré tout très probable que nombre de ses participations et diverses productions vous soient incidieusement familières.
Ce Dark Vador déjanté, aussi bien physiquement que musicalement, hante en effet les enregistrements les plus variés depuis maintenant près de trente ans. Que ce soit dans Japan ou en collaboration avec Mick Karn, Steve Jansen, Tim Bowness (co-leader de No-Man avec sa majesté Steve Wilson, grand gourou de
Porcupine Tree) ou Steve Hogarth (le chanteur de Marillion), notre homme orne, avec une maestria qui n'a d'égal que sa discrétion légendaire, les visions alambiquées qu'il sert d'un décorum baroque et psychédélique.
Cette silhouette mal définie, se dessinant dans l'arrière-plan des scènes foulées avec Porcupine Tree depuis plus de dix ans, dans l'ombre du génial Steve Wilson (encore lui), illustrant à temps complet les inspirations du maître d'enluminures désormais caractéristiques depuis l'album « Signify » en 1996, c'est Richard Barbieri !
L'homme qui tourne plus de boutons qu'il ne joue de notes…
D'un naturel introverti et humble, ce fanatique du son analogique et du sample judicieux n'avait cependant jamais sauté le pas de l'album en solitaire, une solitude qu'il cultive pourtant de son élégance toute britannique. Ces « choses enterrées », il est donc allé les chercher au plus profond de lui même, dans les tréfonds de son âme et de son antre, non sans difficultés (les tournées à honorer, un costume de patron encore difficile à endosser). Accompagné de Percy Jones (basse - Brian Eno, Brand X) et Andy Gangadeen (batterie - The Bays, h band), ce premier effort solo valorise les qualités d'illustrateur sonore de Richard.
Rien de péjoratif ici, tant les qualités impressionnistes de l'œuvre sont sensibles. Rejetant l'utilisation de thèmes musicaux, habituelles balises des productions instrumentales, la palette technique regorge de loops, textures distordues et autres craquements détournés aux provenances incertaines. En s'éloignant ainsi ostensiblement de l'attendu, l'écoute se transforme en un véritable voyage où digressions ambients ( Nevada, Red Square ) et expériences sensitives hypnotiques (ici un groove à la Massive Attack - Fear & Trembling , là une construction digne du label electro WARP - Light On Glass ) se matérialisent en un véritable film imaginaire.
Même s'il ne convainc pas totalement sur la durée, cet essai n'en demeure pas moins attachant et permet de découvrir plus en profondeur les qualités de ce fidèle lieutenant. Ne doutons pas que de nombreux trésors enfouis ne demandent encore qu'à être excavés du jardin secret de Richard Barbieri.