Pourquoi le "Métal" ? - (de la subjectivité du goût musical)
 

Nous aimons le metal. Voilà plus de quinze ans que nous aimons le metal. Ce n'est pas la seule musique que nous apprécions, mais au nombre de concerts entendus et de disques achetés, nous pouvons, sans hésitation, affirmer que c'est le style que nous préfèrons. Si vous êtes parvenus jusqu'à ce site et que vous lisez ces lignes, nous supposons que c'est également votre cas. Vous êtes-vous déjà demandé pour quelles raisons vous aimiez le metal ?

Si l'on en croit le jugement blasé de parents sur un adolescent, nous aurions commencé à apprécier le metal, car cette musique qui fait du bruit nous permettait d'exprimer une certaine révolte. Soit. Mais comment expliquer, alors, que cette passion demeure pour nombre d'entre nous la trentaine (ou plus) passée ? Sommes-nous tous des adolescents rebelles attardés ? nous ne le croyons pas.
En effet, l'aspect puissant du son et la violence des paroles de certains groupes peuvent, éventuellement, expliquer l'attrait exercé sur certains auditeurs en mal de sensations fortes. Mais cette explication n'est pas satisfaisante sur le long terme, et d'autres raisons plus profondes et plus valorisantes peuvent être mises en avant.

Le culte de la guitare

Le premier point commun aux amateurs de la quasi totalité des groupes de metal, au sens large du terme, me semble être l'amour de la guitare. De Pearl Jam à Morbid Angel, de Dream Theater à Black Sabbath, quel autre genre musical met autant en valeur cet instrument qu'est la guitare ?
Que ce soit en rythmique, en solo, en tapping, en sweeping, en son clair ou avec les plus énormes distorsions, en arpèges de guitare classique, ou en aller-retours frénétique sur la corde de mi grave, l'éventail technique des guitaristes de metal décrit un spectre extrêmement large. Un niveau technique élevé est d'ailleurs l'apanage de la majorité des groupes, de même que le public est souvent constitué de connaisseurs qui apprécient une certaine difficulté. La construction des morceaux est généralement complexe et loin des standards « couplet refrain, couplet refrain, solo » sur trois pauvres accords.
Enfin, on pourra noter que la famille du metal au sens large a enfanté quelques-uns des meilleurs guitaristes de la planète, tous styles confondus. Si le grand public citera volontiers Angus Young (AC/DC) ou Slash (Guns n' Roses…), l'histoire retiendra Jimmy Page (Led Zeppelin), Ritchie Blackmore (Deep Purple), Eddie Van Halen, Joe Satriani ou encore Steve Vai, alors que les auditeurs pointus vénèreront la polyvalence d'un John Petrucci (Dream Theater), ou la grandiloquence d'un Yngwie Malmsteen ou de son émule Michael Romeo (Symphony X).

Les périodes grunge (début des ‘90) et new-metal (fin des '90 / 2000) tendraient à me faire mentir, mais on peut considérer qu'elles sont autant un mouvement social, une attitude, qu'un style musical réellement défini par sa technicité. Le grunge et le new-metal sont, justement, le fruit d'une réaction vis-à-vis de l'image ou de la technique affichées par les groupes phares de chacune de leurs époques. D'ailleurs, ils recrutent ou ont recruté massivement leurs fans dans la classe d'âge adolescente, découvrant la musique, bien plus que dans les rangs des adultes déjà connaisseurs de metal. Et même si les guitaristes de ces deux genres sont moins démonstratifs guitaristiquement parlant, la guitare n'en reste pas moins la base du son de leurs groupes.

La diversité du metal

Si l'on y réfléchit bien, il n'y a pas un metal, mais des metal ! De nombreux sous-styles, purs ou issus de la fusion d'autre styles, cohabitent au sein de la grande famille du metal, si bien que l'on peut affirmer que ce genre musical est l'un des plus complexes de tous, du reggae au blues, en passant par le rap.
Livrons nous à un rapide inventaire, non exhaustif, et nous comprendrons que les clichés du grand public sur le hardos de base sont aussi éculés que la typologie et les motivations des fans des styles qui suivent sont diverses : death, black, thrash, grindcore, speed, symphonique, glam, atmosphérique, doom, fusion, gothique, grunge, hard, blues, FM, folk, prog, punk, indus…
Comment comparer Impaled Nazarene et Type O Negative ? Comment comparer Guns n'Roses et Moonspell ?Magö de Oz et Dimmu Borgir ? Napalm Death et Enchant ? Metallica et Megadeth (euh… mauvais exemple !) ? My Dying Bride et AC/DC ? On pourrait continuer ainsi la nuit entière ! De cette diversité découle une grande richesse. Quel que soit l'état émotionnel dans lequel on se trouve, un style de metal au moins pourra coller à l'état d'esprit du moment, que l'on soit d'humeur festive, colérique, contemplative, mélancolique ou dynamique. Deux problèmes découlent néanmoins de cette diversité :

• Les amateurs de chaque genre peuvent être amenés à être très sectaires et à rejeter violemment tout groupe dérogeant aux règles et aux clichés de sa « confrérie ». Ce qui pourrait être une grande famille de fans de metal au sens large du terme n'est bien souvent que l'addition de petites communautés cloisonnées.

• Le non initiés font souvent l'amalgame entre les divers auditeurs de metal, se fiant lamentablement à quelques faits divers montés en épingle par des media peu scrupuleux. Tous les black métalleux ne profanent pas des églises, tous ceux qui écoutent Marylin Manson ne commettront pas un massacre dans leur lycée, les fans de Judas Priest ne sont pas forcément candidats au suicide, de même qu'il n'est pas nécessaire de porter « mullet », bracelets de force et patches Trust pour se rendre à un concert (même si ça aide !) ! On peut s'habiller en costard – cravate et aimer le metal, et c'est en assistant à un concert qu'on se rend compte de la diversité des auditeurs : âge, sexe, habillement, longueur des cheveux…

Une démarche personnelle

Aimerions-nous autant le metal si c'était la musique de « tout le monde », le genre musical le plus écouté du grand public ? Il est probable que non…
En effet, dans le milieu du metal, réside une grande fierté à écouter une musique « différente », demandant une démarche personnelle, autant pour connaître les groupes (peu d'accès aux mass media), que pour se familiariser à leur musique. On ne se réveille pas un beau jour fan de Dream Theater ou de Slayer ! Il est impératif de suivre une sorte de chemin initiatique, tout au long duquel on apprendra à apprivoiser la complexité, la lourdeur ou encore la violence du metal. On est souvent initié par un grand frère, par un ami, et on peut dire que le métalleux est généralement très disponible pour faire partager sa passion à qui s'y intéresse réellement. Les meilleurs albums sont souvent ceux sur lesquels on n'a pas forcément accroché à la première écoute, mais dont on s'est imprêgné lentement, jusqu'à en découvrir tous les secrets. Ce besoin de « mériter » la musique serait contradictoire avec le fait qu'elle soit grand public. Le mouvement progressif, plus que tout autre, revendique ce parti pris d'une musique difficile mais tellement intéressante, et met à profit la grande technique de ses musiciens pour proposer des morceaux riches, mélodiques, émotionnels, regorgeant de changements d'ambiances et de tempos, de longues parties instrumentales et de sons originaux.

Un art plutôt qu'une industrie

Si vous souhaitiez gagner beaucoup d'argent rapidement avec la musique, le metal serait-il le genre vers lequel vous vous dirigeriez spontanément ? Certainement pas. Le rap, le Rn'B (qui est tout, sauf du rythm n' blues…) ou la variété sont indubitablement plus porteurs auprès du grand public. La violence et/ou la complexité des groupes de metal sont telles qu'elles suffisent à exempter la plupart de ces groupes de toute accusation d'opportunisme. Cradle Of Filth serait un groupe « commercial » ? Mais comment pourrait-il l'être réellement en proposant des vocaux aussi suraigus et une imagerie aussi extrême ?
C'est pourquoi on peut affirmer que, dans leur immense majorité, les musiciens metal sont mûs par un amour de l'art et de la musique qu'ils pratiquent, plus que par une logique purement commerciale. Le positionnement de nombre « d'artistes » des grosses maisons de disques découle de véritables études de marché, telles qu'on pourrait en mener pour un produit de grande consommation. La question qui préside est : « que doit-on enregistrer pour plaire au plus grand nombre ? », d'où une batterie de reprises sans risque et un matraquage préventif des nouveaux chanteurs au cours d'émissions telles que « Star Academy » ou « Popstars ». Rares sont les labels qui laissent à un groupe le temps de s'établir sur le moyen ou long terme. La rentabilité immédiate est la valeur commune à la plupart des grandes maisons de disques.

En aparté sur ce point,nous souhaitons préciser que l'appellation de musique « commerciale » nous a toujours un peu surpris. En effet, quel groupe sort un disque dans le but de ne pas en vendre ? Le simple fait de se produire devant un public payant ou de publier un album est en soi une démarche « commerciale ». Etre « commercial », ce serait donc laisser s'effacer ses convictions artistiques, choisir les arguments les plus vils, dans l'unique but de vendre un maximum, quelle que soit la qualité du produit proposé.
C'est pourquoi nous achèverons ce débat sémantique en concluant que le metal est une musique qui n'est pas que commerciale, et qu'il l'est certainement moins que de nombreux autres genres musicaux.

Un esprit de communauté

En dépit des querelles de clocher évoquées plus haut, les auditeurs de metal revendiquent l'appartenance à une sorte de famille, et partagent quelques valeurs communes : une certaine indépendance d'esprit, un goût de la fête « rock n' roll » et parfois, de la provocation, ainsi que quelques codes vestimentaires historiques et assez œcuméniques (cheveux longs, tee shirts, vêtements sombres, sans oublier une facheuse tendance à secouer la tête en rythme !). Certes, on tombe là dans le cliché, mais on ne peut nier un certain esprit de communauté au sein du metal. Contrairement à l'image véhiculée, les concerts de metal donnent rarement lieu à des débordements ou à des violences autres que « bon enfant » (pogo, slam). Les spectateurs sont là dans un but commun, pour profiter du groupe présent sur scène, pour échanger de la sueur et de l'énergie, pas pour chercher des embrouilles. Enfin, la connivence est souvent rapide entre deux personnes ayant localisé chez l'autre un membre de la confrérie metal.


Nous venons de survoler quelques unes des raisons qui, selon nous, nous amènent à aimer le metal.
Vos motivations sont peut-être encore différentes, mais nous pensons que parler des ces cinq points à un novice en metal ne peut que valoriser notre mouvement et donner un bon premier aperçu de ce qui nous rassemble. En tout cas, que vous soyez plutôt prog, black, death, doom, thrash, glam ou tout à la fois, n'arrêtez pas d'acheter des disques et de vous rendre aux concerts. Même si cela ne permettra pas la reconnaissance grand public du métal, cela lui permettra au moins de continuer sa route et de donner du bonheur à quelques générations de chevelus !

 
par Mitch
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